Quelle route pour la Basse-Marche ?
Il y a bientôt 10 ans, Cécile Duflot, alors Ministre de l’Égalité des Territoires et du Logement, était en visite du côté de Bellac. À la fin de la journée, quelqu’un l’entend dire « Ah, la RN 147, je ne l’oublierai pas ! En deux jours, j’ai entendu son nom 2.000 fois ! » Et pourtant. Il y a dix ans donc, c’était déjà un sujet polémique. Et encore 20 ans, 30 ans auparavant, sans doute ! Aujourd’hui nous en sommes toujours au même point. Face à ce serpent de mer local, nous avons voulu faire un dossier Mefia Te ! Pour parler de la route certes, mais aussi pour aborder les notions d’enclavement, de mobilité, de grands travaux, etc. Eh, la Basse-Marche, va te faire enclaver !
Le réflexe, quand on parle de cet axe Bellac – Limoges, c’est de le comparer à la route Saint-Junien – Limoges. Nous n’avons alors que nos yeux pour pleurer, d’autant qu’à une lointaine époque, les deux réseaux étaient à peu près aussi mauvais. Seul le nôtre est resté un « chemin de chèvres », comme on dit ; d’ailleurs, c’était déjà vrai au XVe siècle, comme vous le verrez dans un article de ce dossier ! Mais en prenant un peu de recul, en se baladant dans d’autres coins de France, ou bien en regardant une carte, tout simplement, on se rend compte que cette perception d’enclavement est toute relative quand même. Il y a sûrement pas mal d’habitants de régions vraiment reculées
qui aimeraient avoir droit à un enclavement en mode bas-marchois…
Ensuite, il est certain que cette RN 147 est inconfortable, qu’elle est accidentogène, et que se limiter à une route pareille pour relier deux des pôles de la grande région Nouvelle Aquitaine que sont Limoges et Poitiers, ça fait tâche. On se demande quelles sont les raisons qui ont poussé l’État à ne rien faire, ou presque, pendant ces décennies. Une telle inaction en matière d’infrastructures locales, associée à la disparition des services publics de proximité, c’est absolument parfait pour susciter un vrai sentiment d’abandon des populations et alimenter le discours de rejet des
institutions. Bien joué.
Et voici qu’arrive un beau projet d’autoroute « concédée », c’est-à-dire financée en partie par des acteurs privés, et payante. Projet qui bénéficie d’une belle campagne de communication et qui a le mérite de mettre un coup de pied dans la fourmilière. Sur notre territoire, une consultation publique a été menée ces derniers mois pour évoquer cette épineuse question. Elle a donné lieu à des confrontations parfois houleuses, mais au moins elle a permis un débat, et nous l’évoquons dans ces pages. Ce projet d’autoroute concédée a des inconvénients évidemment, et surtout, il ne doit pas faire oublier que ce n’est pas là le seul scénario sur la table ; le scénario dit « alternatif » mérite qu’on s’y attarde également.
Notre territoire a certes besoin d’infrastructures routières plus modernes. Mais quand on entend des arguments du type « Ce territoire est mourant, et sans l’autoroute, il va mourir », on bouillonne. C’est trop facile de se draper dans cette forme de résignation et de conditionner le développement de la Basse-Marche à la seule présence d’une autoroute flambant neuve. D’autant plus que la réalité est souvent plus complexe, comme nous l’abordons à travers l’exemple de l’autoroute Pau – Langon. De nouvelles questions se posent également en matières écologiques et sociales, on ne peut pas les rayer comme ça, sous prétexte qu’on attend depuis 40 ans. Ceux qui seront en première ligne dans 40 ans ont aussi leur mot à dire, non ?
Bref, lisez ce dossier, documentez-vous par ailleurs, faîtes-vous votre propre opinion. Et rendez-vous en 2032 pour un nouveau point « enclavement » ?
Edito du dossier à lire dans le Mefia Te ! numéro 13